Galerie Maïa Muller
Sacha Ketoff ou le rêve d'Icare

28/04/2016
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Communiqué de presse :
Le rêve d’Icare ?

Peut-être.

Sacha Ketoff appelait parfois ses modèles des oizos.
Je ne sais pas pourquoi mais cela lui allait bien. Avec Sacha, rétrospectivement, on ne savait pas vraiment pourquoi ; il y avait une telle richesse chez cet homme, une pudeur extrême alliée à une vantardise phénoménale.
L’important n’est plus là ; il y a l’œuvre. Celle que Maïa Muller nous invite à redécouvrir par séquences.
En ce printemps 2016, c’est la séquence oizos.
Depuis sa première exposition Aircrash (des vestiges d’avions de chasse crashés) Sacha Ketoff s’était installé en haut près de la stratosphère d’où il avait parfois, disons-le, un peu de mal à descendre. Puis il a repris ses avions, des Spitfire, des oiseaux, leur a fait subir toutes les avanies possibles.
Pendant une longue période ce fut un pigeon ou tout autre volatile (qu’est-ce qu’on pouvait voir voler d’autre à Ivry ?)
J’ai passé beaucoup de temps à observer les animaux desséchés qu’il installait sur sa table de travail sans comprendre où il voulait en venir ; je trouvais ça, disons, morbide.
Puis j’ai compris que c’était souvent des autoportraits.
Un jour l’oizo a chu.
Mais avant de tomber il a volé, survolé des villes, croisé des Spitfire, survolé Ivry et a terminé sa course sur l’étroit balcon d’un artiste attentif au ciel et à tout ce qui plane.
Sacha Ketoff a passé des années à reprendre la forme tourmentée des oiseaux effondrés.
Atterrissages ratés mais aquarelles superbes. Série d’oiseaux en or ou en nero intenso qui flottent doucement dans le courant d’air de l’atelier.
C’était un artiste tout entier envahi par sa passion du dessin, sa délectation pour les supports et les outils : papier de soie paraffiné, collé, en feuilles superposées qu’il manufacturait lui-même en maniaque absolu des matériaux, des outils, des machines.
Ses carnets, ses crayons, la gouache, l’aquarelle, une symphonie de couleurs douces et de sombres intensités nocturnes, le tout travaillé à plat, sur la feuille, face à son modèle.
Ou sur la feuille géante qui flottait sur le mur de son atelier et qui bougeait au moindre courant d’air.
La légèreté de ses œuvres sur papier est propre au matériau ; l’artiste s’ingéniait parfois à la contredire par la force de son propos. Un propos dans lequel il associait tout à tour les belles machines, les femmes splendides, de belles paires de chaussures (qu’il cirait plus volontiers que les bottes des critiques d’art), une intense sensualité, mais aussi des objets industriels, une moto, des avirons … et lui-même.
L’exposition que propose Maïa Muller deux ans après la disparition de l’artiste en avril 2014 est un bref panorama de ce sujet volatil et de volatiles auxquels se sont joints quelques uns de ses outils de prédilection : chaussures, crayons... sans compter l’artiste lui-même présent dans l’un de ses nombreux portraits.
D’autres oiseaux et d’autres sujets patientent dans des malles, que Maïa Muller nous fasse découvrir les contrées inédites de l’univers de Sacha Ketoff.
Un jour peut-être nous sera accordé le privilège de découvrir pleinement la totalité de son oeuvre et de ses multiples talents.

Dans le civil Sacha Ketoff portait souvent un béret rouge.

Francis Lacloche
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