Fantaisiste, Christian Lhopital puise la matière de son art dans l'univers de notre enfance mais aussi de nos rêves enfouis. Il explore sur un mode hallucinatoire le pays des chimères et de l'écriture automatique, qu'il façonne au moyen du graphite, des couleurs et des objets, dans un langage formel très libre.
Par Marie-Jeanne Caprasse
L'univers plastique de Christian Lhopital semble directement connecté à la sphère étrange du monde des rêves et du subconscient. Il fait parler la matière, le trait, la tache, suscitant un choix multiple d'associations et d'interprétation des images.
On connaît ses dessins «symphoniques», où les formes répétées s'entrelacent l'une dans l'autre et phagocytent l'espace de la feuille blanche, empêchant toute respiration du dessin. Quelques exemples de la série «Tout va bien» sont ici exposés, nous entraînant dans un abîme halluciné et sensuel.
Brisant cette logique rythmique, la série de petits formats présentés en groupes de quatre introduit une notion de narration mais aussi l'espace vide, la respiration, le silence entre les lignes. Le regard chemine entre ces formes aux traits tremblants et ces petits personnages aux physiques indéterminés, et l'on se prend au jeu en commençant à se raconter des histoires. Ici, comme dans la série verte, l'humour est omniprésent mais toujours assorti d'un trouble lié à la déformation des figures.
Ses dernières sculptures, toujours réalisées à partir de peluches transies dans de la peinture et d'accessoires assez sommaires comme des tables ou des bougies, sont porteuses d'images fortes qui répondent à son jeu permanent avec nos joies et nos peurs enfantines.
L'épure du dispositif recentre le regard sur l'espace de la scène et la monochromie en blanc la dramatise tout en l'extrayant du réel. Ici, il est question d'espace, de vide et de plein, de jeux de miroir sans miroir. Seuls les yeux des peluches, billes d'un noir profond, nous interpellent par leur présence et indiquent là où la vie s'est tapie.
Ce jeu de cache-cache est au fondement du travail de l'artiste, comme en témoigne également la série de grands dessins sur papier «En perdition». Christian Lhopital transpose ici une technique développée dans ses fresques murales où il utilise la poudre de graphite et la modèle à l'aide d'une gomme, en retouchant certaines parties. Un travail qui repose sur la notion de libre cours et l'enfantement d'un monde de malice et de mystère révélé, comme par enchantement, par la main de l'artiste.